Un titre évocateur à l’approche de l’Halloween? Détrompez-vous, il n’y a aucun lien. C’est l’histoire d’un coureur qui se cherchait, plusieurs semaines après avoir accompli un grand exploit. On m’avait pourtant averti: un ultra marathon, ça te change. Aujourd’hui, je vous confirme que c’est vrai et sincèrement, la préparation du « après » est toute aussi importante que celle du « avant ».
La descente
Le premier choc fut ressenti lors de mon retour à la vie normale, fin Avril 2016. Je me suis retrouvé devant RIEN – aucun défi, aucun objectif à atteindre, aucune préparation méthodique à suivre. RIEN. Bien sûr, je retrouvais ma famille et amis, mon travail, ma routine. Mais curieusement, cela avait perdu de son éclat car il n’y avait pas de défi. Je me suis plongé tête première dans le travail mais encore là, la magie n’opérait pas, il manquait cette notion de défi. Prétentieux vous me direz? Aucunement. Je me rendais compte que je n’avais plus de « What’s next ». Alors, je me suis remis à la course ou plutôt, j’ai tenté de m’y remettre. Malheureusement, rien n’y faisait, chaque sortie était devenue morne, sans but. Je me suis dit que ce serait passager, mon entourage me répétant sans cesse que c’était normal que je prenne une pause après un tel exploit et qu’après tout, il serait bon que je profite de l’été et de la vie.
Je touche le fond
Mais voilà, les semaines passent et se ressemblent : je cours à peine 30 km par mois, je me cherche, j’ai l’impression qu’un vide s’est installé. A l’approche des vacances de juillet, nous n’avons pas de plans spécifiques. C’est ma fille de 11 ans qui, à la fin de l’année scolaire, me lance en plein visage: « Papa, on n’a rien de planifié pour nos vacances. Toi, tu es allé courir au Maroc, tu t’es fait plaisir mais cet été, on n’a rien prévu. C’est poche et franchement, ces derniers temps, tu sembles ailleurs, passant plus de temps sur ton iPad à jouer et sur les réseaux sociaux. » Ce constat, cru, m’a fait mal mais il était sans appel; elle avait raison. Les enfants ont cette faculté de nous présenter la vérité sans filtre. J’ai paré au plus urgent en fonction du temps et du budget que nous avions. C’est ainsi qu’on a mis les voiles sur New-York pour 5 jours et le Bas St-Laurent pour un autre 5 jours. Du temps en famille, oui. Mais incapable de me remettre à la course, incapable de décrocher des réseaux sociaux. Et toujours à la recherche du « What’s next ».
Le déclic
C’est le samedi 30 juillet, dernier weekend de mes deux semaines de vacances, que tout a débloqué. Je réalisais ce que ma fille me disait mais surtout, je comprenais que je devais me reprendre en mains, personne ne le ferait pour moi. Pour réussir, je me suis imposé un sevrage d’Internet avec un mois d’absence sur les réseaux sociaux et en prime, le retrait de tous mes jeux sur iPad et iPhone. Je dois avouer que ce fut difficile de couper les ponts avec Internet; il est tellement facile et tentant de s’y rendre, de s’y perdre, de chercher tout et rien pour réaliser qu’on y passe beaucoup de temps. Beaucoup trop. Que je me perdais au milieu de ce monde virtuel. Je devais couper totalement et résister à la tentation d’y revenir pour un mois. Ce fut très difficile et malheureusement cela fut perçu par certains amis comme un adieu, une coupure avec eux. C’est vraiment triste car c’était nullement mon intention vis-à-vis ces personnes.
Pourquoi je vous dis tout cela? Simplement pour vous partager mon expérience, vous faire réaliser tout le temps qu’on peut y dépenser et à la longue, oublier le monde réel qui nous entoure, s’oublier tout simplement. Aujourd’hui, je ne me suis pas coupé d’Internet mais j’ai appris à doser mes visites sur les réseaux sociaux.
Quant à la course, j’y ai replongé. Oh que ce fut difficile, mon orgueil en prenant pour son rhume à plusieurs reprises. Une sortie de 10km était devenue pénible, moi qui venais de compléter un ultra marathon de 250km il y a quelques mois à peine.
La renaissance
Mais j’ai tenu le coup et après 3 semaines, me revoilà revenu à un rythme de course normal complétant une distance mensuelle de 160km pour Août et Septembre. Et voilà qu’Octobre arrive à grands pas avec le Défi St-Jude, une course sillonnant le cimetière Côte des Neiges à Montréal. En échange d’un article sur mes impressions de la course, le blog Le Cahier m’a gracieusement inscrit au 15km. C’est donc en famille qu’on s’est rendu sur le site enchanteur, arrivant à la dernière minute, à temps pour récupérer mon dossard et prendre le départ.
La première chose qui m’a frappée, c’est le calme. Au fil de mes foulées, mon regard parcourait les épitaphes et mausolées, lisant au passage le nom des personnes inhumées. Tant de gens, tant de noms et d’histoires de vie différentes, tous alignés et identifiés parfois par une simple pierre, parfois par un monument majestueux. Et voilà que je réalise la chance unique que j’ai – celle de vivre, d’être en santé, d’être libre.
Me voilà renaître.
Je saisis l’occasion qui m’est donnée et je cours. Je cours pour le plaisir de courir, le désir de me dépasser. Je cours pour moi. Me sentir vivant. Ce parcours, je le dévore au gré des kilomètres qui me séparent de l’arrivée: un 15km en 1h09. Au-delà de la première place, ma récompense fut le goût et le plaisir de courir que je venais de redécouvrir.
La suite
Où cela me mènera-t-il? Depuis cette course, la flamme brûle à nouveau en moi. Le weekend dernier, j’ai enfilé mes chaussures et j’ai couru un marathon, le premier depuis le MDS en Avril. Malgré les conditions météo difficiles, j’ai fait un temps respectable de 3h38, améliorant mon temps sur cette distance de 2 minutes.
Quel sera le prochain défi? Je ne le sais pas mais chose certaine, il y en aura un. Ou plusieurs, devrais-je dire. Car si j’ai appris une chose de cette aventure c’est que je suis une personne qui carbure aux défis. La routine, tel un cancer, m’est fatale. Ce que je ne sais pas encore, c’est la nature du défi. Mais chose certaine, il y en aura toujours et ce, tant que je vivrai.
Karym
Merci d’avoir partagé ton histoire « avant, pendant et après ». Le moment que ma famille a terminé deux 2km, un 5km et un 21km à Ottawa en 2014 la course est devenu un sport de famille. Hélas la flamme était multipliée par 4 chaque fois que je m’inscris à une course après mon deuxième 70.3 Ironman qui n’avait plus de défi non plus. Ta fille va te dire « C’est quand notre prochaine course ensembles? »
Magique et on s’en fou pas mal du temps quand on court en famille.
Effectivement, partager cette passion de la course avec le reste de la famille est une solution pour se retrouver tous ensemble mais encore faut-il que tous veulent courir!! En ce qui me concerne, la course a toujours été un plaisir égoïste, une manière de me faire plaisir, qu’à moi, m’échapper le temps de quelques heures ou kilomètres.
Comme toute chose dans la vie, l’équilibre demeure la clé du bonheur!
Merci d avoir partagé et je souhaite que cela te fasse autant de bien à toi qu a tes lecteurs dont moi …il faut du courage pour réaliser l ensemble de ce projet…préparation….événement et retour…tu reviens en force sans l ombre d un doute ! Salut !
Merci Alain! Je suis toujours émerveillé de voir que la préparation physique n’est jamais la plus complexe à réaliser – la préparation de l’esprit, voilà où trop souvent on s’accroche et on abandonne. Il faut de la résilience, de l’humilité et de l’audace pour accomplir nos rêves!
Bonnes courses à toi!
Wow!…. Un texte très peaufiné, d’une grande sensibilité et bien sûr, d’une franchise palpable. Connaît-on ceux qu’on côtoie au quotidien? Très peu. Mais ce n’est pas réellement nécessaire pour éprouver envers eux de l’admiration, de la fierté et une grande affection. Chacun son jardin secret et la liberté de laisser filtrer le monde intérieur qui nous habite. Et, bel avantage, c’est de se laisser surprendre par un texte comme celui que je viens de parcourir. Chapeau et genoux fléchis, tel un noble devant son souverain.
Bon , charrie pas Vivianne. Bonne journée à toi. Et laisse-toi guider par ton instinct, il est parfois supérieur à la raison. Ta môman.
Quel plaisir de voir que ma mère répond à mon article et surtout, un honneur de prendre connaissance du contenu de ton message.
La reconnaissance par ses pairs et plus particulièrement par sa famille, demeure l’ultime récompense.
Merci maman!!
Karym, As-tu remarqué que l’arrière-fond de la dernière photo de ton article, i.e. les toits de maisons, te fait ressembler à la sœur volante. Un choix tout à fait approprié à ton envol. C’est une blague de ta môman
Merci d’avoir partagé ton expérience! Le MDS est une aventure tellement grandiose… qui ne s’arrête visiblement pas à la fin de la course. Félicitations pour ton courage! Bien contente de savoir que tu retrouves du plaisir à courir et bravo pour tes performances!
Super de bel article Je te felicite et c est toujours un plaisir de te lire Je te comprend , moi je carbure aux défis , j en ai TOUJOURS un devant moi , ne serait ce que pour me garder motivée …j adore avoir des défis , des objectifs … Durant l été j ai participé à plusieurs courses de 5-10- km en ayant pour but de toujours amelierer mes temps ….et j ai fait Harricana avec tellement de plaisir et à chaque km je pensai au MDs et me disais , WOW ici c est seulement 65 km et à la fin , j avais juste le gout de continuer !! Du plaisir à l état pur Je pense au Fire and Ice en Islande , j ai fait 3 Ultra. Marathons en Islande et j ai adoré …la traversée de rivieres , les volcans , l odeur du souffre …le froid et surtout la beauté magique des paysages ….à faire rêver .. Je te souhaite un bel automne Moi je suis à Santa Barbara pour encore quelques jours , je cours en côtes et sur le bord de l eau , j adore…. Je suis inscrite au marathon de Miami pour la fin janvier , ce sera ma 10 ieme participation …d habitude je fais le demi , cette année ce sera le marathon Toi si tu as des projets de course , tu me le laisseras savoir Au plaisir de te lire Anne
Envoyé de mon iPad
Très inspirant Karym! Tu écris bien, tu sais bien exprimer tes sentiments et c’est touchant! Merci pour ton récit ☺️
Merci Helena pour les bons mots!
Way to go Champion!
Tu es une véritable inspiration
Quietly inspirational… you’ve touched on some very real issues…..thank you for sharing…