La revanche du Marathonien

Nous sommes le 20 septembre 2015, 12:17. Je viens de compléter mon troisième marathon avec un temps de 3h40. Ça y est, j’ai réussi. J’ai eu ma revanche sur le parcours du Marathon de Montréal – j’ai maintenant l’esprit en paix.

Prologue

Marathon Mtl 2014 - 1Il y a un an, je m’apprêtais à courir mon premier marathon: une épreuve exigeante compte tenu de la température anormalement chaude pour la saison, soit 26 degrés et gros soleil. Malgré tout, je m’étais fixé un objectif de terminer l’épreuve du Marathon de Montréal en 3h45. Après avoir parcouru 21km en 1h45, je croyais fermement que cela était possible. Bad call: je croise la ligne d’arrivée en 3h53… soit 8 minutes au-delà de mon objectif. Huit minutes… Elles resteront gravées dans mon esprit pendant un an et ce malgré toutes les félicitations et encouragements que je recevais de mon entourage: « … voyons, c’est en deça de 4 heures… super temps pour ton premier marathon… il faisait très chaud, c’est normal d’être plus lent… » Au fil du temps, j’ai analysé ma course et compris que le défi des longues distances comporte un élément psychologique important; il faut savoir gérer sa course, rester focusé, se faire confiance et surtout, y aller par étape.

Un objectif ultime ou une étape?

Sans surprise, mon inscription à l’épreuve de 2015 s’est faite dans les jours suivants l’édition 2014. J’avais un objectif: battre mon temps et le courir en 3h40. Au fil du temps et avec ma décision de courir le Marathon des Sables, le Marathon de Montréal constituait une étape importante dans ma préparation et curieusement, le défi du temps à battre devenait moins important. Après avoir couru un 35 km le dimanche précédent, je me sentais confiant de courir les 42,2 km sans trop de problèmes. Curieusement, cette confiance m’a rendu plus « zen », au point où je me suis couché à 23:00 la veille de la course, après avoir englouti le fameux plat de pâtes… et quelques ailes de poulet format jumbo (milles excuses à mon nutritionniste qui m’a fourni un plan nutritionnel strict).

Prémonitions, ou comment se stresser pour rien

Après une nuit relativement calme, c’est par moi-même que je me réveille à 5:35… Tiens, le réveil n’a pas sonné à 5:30?? Ben non, je n’avais pas configuré l’alarme correctement. Pas grave, j’ai l’habitude de me lever tôt. Je déjeune, prépare mon sac et m’apprête à partir quand je remarque que mon dossard est sur le divan. Hmmmm, étrange… On dirait que la journée part mal. Je quitte la maison et après 3 km sur la route, je me questionne si j’ai pris les épingles pour accrocher mon dossard… Et non, elles sont à la maison… On retourne les chercher mais sur le chemin du retour, je dois m’arrêter à un passage à niveau car un train de marchandises passe. C’est long un train du CN… et le temps lui, passe… Quelques minutes plus tard, je reprends la route, récupère mes épingles (bien visibles sur le comptoir de la cuisine) et re-repars. Heureusement, il reste tout juste assez de temps pour laisser la voiture à Longueuil, monter sur le pont et me rendre à mon coral. Faut voir le bon côté des choses: le pire est passé et je n’attendrai pas longtemps.

Marathon Mtl 2015 - 7Le départ est donné à 8:30 et on décolle. Je suis toujours impressionné de voir des coureurs s’arrêter après 200 mètres de course pour aller « au petit coin » – messieurs: pourquoi partir dans les corals du début si c’est pour perdre des précieuses minutes au début?? Allez vous soulager et partez un peu plus tard votre course « non-stop ». Sûrement une stratégie que je ne comprends pas…
Je prends vite mon tempo de 5:00/km et je m’agrippe à divers coureurs qui ont la même vitesse que moi, incluant Anne-Lune qui m’épate de pouvoir conserver cette vitesse et en même temps, entretenir une conversation avec son amie. Pour ma part, j’ai hâte de croiser la Place Jacques-Cartier dans le Vieux-Montréal, endroit où mes parents et filles devraient me saluer et m’encourager ». A 10:00, je monte la côte de la Place Jacques-Cartier… personne que je connais… bof… on s’est manqué. Pour toute récompense, je récupère une demi-banane que j’avale tout eMarathon Mtl 2015 - 1n courant et je ne peux m’empêcher de sourire en imaginant un coureur, si près du but, glisser sur une peau de banane. Voilà pourquoi j’ai lancé la mienne à bout de bras sur le trottoir – un blessé potentiel en moins!!

Ayant perdu mes lapins en cours de route, je m’approche du parc Lafontaine plein d’énergie avec 2 idées en tête: je vais croiser mes proches et c’est à cet endroit que j’ai cassé l’an dernier – ça n’arrivera pas cette année. Sous les acclamations de la foule, je cours et je regarde de part et d’autre – personne… ben voyons, c’est bizarre… que se passe-t-il?? Où sont-ils?? Je vais sûrement les croiser sur St-Joseph.

Deux demis non équivalents

Demandez à n’importe quelle personne qui a couru le Marathon de Montréal et plusieurs vous le diront: la coupure après avoir croisé la mi-parcours est brutale. On a l’impression (et c’est vrai!) qu’il y a tout un party au Parc Lafontaine et qu’en ce qui nous concerne, on n’est pas admis. En fait, on nous demande de faire un détour de 21 km pour y avoir accès. Un grand merci aux résidents de la rue Christophe-Colomb et des environs, incluant le Parc Laurier car honnêtement, c’est drôlement long et pénible mentalement de faire l’aller-retour jusqu’à Jarry et votre présence tout a
u long du parcours est stimulante. De retour sur St-Joseph, nous sommes au 30e km. C’est le moment où le mental veut prendre le dessus et te faire remarquer qu’il y a un métro qui suit le même trajet, que 5 stations séparent le point actuel de ta destination (le Stade) et qu’il y avait peut-être une raison pour laquelle l’organisation du Marathon nous donnait une passe de métro gratuite. Faisant la sourde d’oreille auprès de ce mental trop rationnel, des mollets et tendons d’Achille qui t’élancent à chaque foulée, je me change les idées en fixant au loin les cônes oranges et pancartes électorales en me disant que chacune constituait une destination à rejoindre. Merci donc à la Ville de Montréal et nos politiciens pour votre apport à ma course.

Apercevoir le Stade demeure pour moi la confirmation que je réalise un exploit peu banal et… qu’il neMarathon Mtl 2015 - 12 reste que 5 km à parcourir. Je regarde le temps et je calcule entre deux gorgées d’eau. Mon objectif est atteignable… J’en oublie mes douleurs, le métro, le mental, les cônes et mêmes les enfants qui tendent les mains en « high five » (désolé…!) et j’augmente la vitesse. 39km… 40km… Je vois le virage à gauche au 41e km… J’accélère… La foule est présente mais pas la famille… Peu importe. Pour une raison inconnue, sous les applaudissements de la foule, je lève les bras dans les airs et les encourage à faire plus de bruit… JE VEUX et JE VAIS le terminer dans les temps: 3:40:10

La satisfaction

L’effort additionnel fourni sur les derniers kilomètres se fait ressentir; après avoir récupéré ma médaille, mon sac de victuailles et 2 bouteilles d’eau, je me sens étourdi et les frissons apparaissent. Et comble de malheur, je ne trouve pas ma famille qui transporte mes vêtements. Mais peu importe, je viens de remporter mon défi: j’ai couru mon marathon en 3h40 et j’ai l’esprit en paix. Cela vaut bien un repos au soleil. Je m’allonge sur l’herbe et pendant 15 minutes, je savoure. Voilà 3 ans que je cours et depuis mon premier marathon, je viens d’abaisser mon temps de parcours de 13 minutes. Je peux encore marcher et mieux encore – j’ai plus que jamais du plaisir à courir. Marathon Mtl 2015 - 21C’est finalement ma fille qui me sort de mes rêveries et me saute littéralement dessus pour me féliciter (ouch les muscles!). Ma famille est bien sûr déçue et s’excuse de m’avoir manqué à chaque point de passage mais heureux de me voir en forme et constater que j’ai atteint mon objectif.

Épilogue

Plus je cours, plus je me rends compte que chaque course constitue un test pour moi, autant physique que psychologique. La vaste majorité d’entre nous n’ont ni l’aspiration ou les aptitudes pour prétendre à une place sur le podium. Par contre, et c’est là que vient notre plaisir, c’est la capacité que nous avons de pouvoir nous dépasser, ne serait-ce que pour un court moment, et d’en ressentir les bienfaits et avant tout, la satisfaction. Un triste événement est venu assombrir cette journée avec le décès d’une coureuse et en ce sens, on doit se rappeler que le dépassement de soi doit être équilibré avec de la préparation, de l’accompagnement et qu’on doit demeurer à l’écoute de son corps. Et je ne peux m’empêcher de remercier les bénévoles et supporters car sans vous, l’événement ne serait rien. Merci 42,2 fois!

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